Le film d’animation / comédie musicale Vivo, sur un kinkajou qui part en voyage pour livrer une chanson, peut prendre des airs de road-trip farfelu et globalement plat, mais c’était sans compter sur les chansons stellaires du film, signées pour la plupart par Lin-Manuel Miranda, qui reflètent l’artiste à son meilleur.
Dans le cadre de son dernier bilan trimestriel, Netflix s’est vanté d’avoir rencontré son plus grand succès avec un film d’animation à ce jour, un autre signe de sa polyvalence à toute épreuve. Mais malgré un effort concerté pour augmenter l’animation en interne, le film en question n’était pas de leur propre cru mais plutôt une acquisition liée au Covid, réalisée et préparée par Sony pour une sortie sur grand écran mais vendue en panique lorsque les cinémas ont fermé.
On parle évidemment de The Mitchells vs the Machines, une petite pépite d’animation débordante, nettement différente de tous les dessins animés vus sur la plateforme de streaming jusqu’à présent.
Plus tôt cette année, Sony Animation a également choisi de céder son aventure musicale estivale Vivo qui, après le succès des Mitchells, se confronte à un public avec pas mal d’attentes, d’autant plus avec l’implication de l’homme merveilleux derrière Hamilton : An American Musical, Lin-Manuel Miranda, sortant de son contrat avec Disney pour honorer Sony de sa voix, de ses chansons et de son nom.
Nous sommes à La Havane, Cuba, et un musicien âgé, Andrés (interprété par le musicien cubain légendaire Juan de Marcos González), se produit sur une place locale avec son fidèle kinkajou, Vivo (Miranda). Alors que le sing-rap de Vivo peut être compris par nous, les téléspectateurs (même si parfois nous souhaitons que ce ne soit pas le cas), les humains qui l’entourent dont Andrès n’entendent est un couinement.
Lorsque l’ancienne partenaire de chant d’Andrés, Marta (Gloria Estefan) reprend contact après des années de silence en lui offrant la chance de la rejoindre sur scène lors de son dernier concert à Miami, il voit une opportunité : avouer enfin les sentiments qu’il n’a jamais osé lui avouer quand ils étaient jeunes, sous la forme d’une chanson d’amour spécialement conçue. Mais la tragédie frappe et Vivo doit faire le voyage seul pour honorer son vieil ami pour la dernière fois.
Alors que Vivo partage l’éclat visuel et la bonhommie générale de la dernière production de Sony, il manque à peu près tout le reste, une aventure musicale douce et colorée qui n’est pas assez douce et colorée, côtoyant des plaisirs simples qui s’estompent dès que la musique s’arrête. Il faut dire aussi que les Mitchells était déterminé à tracer sa propre voie, là où Vivo s’intéresse beaucoup plus à l’écriture du jeu Pixar, en particulier dans son premier acte qui fait de son mieux pour susciter l’émotion du genre excentrique que nous connaissons tellement bien.
L’ouverture à la fois dynamique et tragique mixée dans une animation saisissante fait écho à bien d’autres films d’animation qui ont nourri les salles cette dernière décénie, mais les numéros musicaux de Miranda nous rapprochent des Disney « old shcool » et alors que le réalisateur des Croods, Kirk DeMicco, essaie de contraindre son film en diagramme de Venn de ces deux écoles, il peine à lui donner ne serait-ce qu’un peu de sa propre personnalité.
Comme tant de films d’animation, le récit s’articule autour d’une quête maniaque (alors que Vivo se rend à Miami avec l’aide d’une jeune fille idiosyncratique), mais elle n’est de celles assez imaginative ou excitantes qui fait que nous nous laissons emporter. Les lieux sont minimes, les enjeux moyens et les personnages qu’ils rencontrent en cours de route pas assez amusants ou distinctifs.
Il y a cependant dans Vivo une esthétique remarquable. Les personnages et l’action sont exagérés comme souvent dans l’animation, mais les rendus approchent le photoréalisme dans les ombres et les textures tout en s’en écartant dans la conception et d’autres ambiances pour devenir plus évocateurs, incorporant parfois même des dessins au trait et ce que nous appelons maintenant « 2D ».
Vivo vit aussi et surtout à travers la « magie » de Miranda, qui distingue le film de la plupart des comédies musicales animées. C’est un plaisir d’entendre sa verbosité hyper habile dans le numéro d’ouverture. La chanson qui se démarque est probablement « My Own Drum », la déclaration d’indépendance du pouvoir féminin de Gabi, interprétée avec brio par Ynairaly Simo.
En quelques mots, Vivo décolle grâce à un kinkajou mignon, de la bonne musique et quelques éléments visuels intéressants, mais en fin de compte ne maitrise pas vraiment l’atterrissage.
Notre note : ⭐ ⭐ ⭐ ★ ★
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