Que faut-il retenir de la Fashion Week de Milan ?

Des vêtements transparents, des chaussettes très présentes, la veste comme élément central de la tenue : que doit-on retenir des défilés de mode milanais ?

Retour sur les défilés de mode homme printemps-été 2016 à Milan

De la transparence chez Ermenegildo Zegna, une élégance intemporelle pour Emporio Armani et des "chinoiseries" au menu de Dolce&Gabbana : à Milan comme à Londres (et avant de débriefer les défilés parisiens), il y en a eu pour tous les goûts à la Fashion Week italienne.

Ermenegildo Zegna : romantique mais pas que

Si les baskets blanches sont désormais bien installées dans nos dressings, celles-ci manquent parfois d'originalité. Après tout, rien ne ressemble plus à une paire de chaussures blanche qu'une autre ...Lire la suite

L'homme selon Stefano Pilati, le directeur artistique d'Ermenegildo Zegna, est "romantique mais sûr de lui, fort et avec une attitude presque féminine", en insistant sur le "presque".
Loin de lui l'idée de faire défiler ses mannequins en maillot de bain, comme l'a fait Dirk Bikkembergs, dans le cadre enchanteur des Thermes de Milan.

Non, chez Zegna, on porte des costumes noirs, des manteaux trois quarts, en matière fluide, et des chemises à manches longues. Les motifs sont écossais ou prince-de-galles, et les couleurs très consensuelles : beaucoup de gris, du rose mais pâle, du violet. Un seul petit "soyons fous" dans ce défilé, et qui semble en passe de devenir une tendance si l'on en croit ce que l'on a ensuite vu à Paris : la transparence.

"C'est l'approche tailleur de la mode, traduite en transparence", explique Stefano Pilati, commentant les larges pantalons en voile de coton de ses mannequins, resserrés aux chevilles, mais dont certains, blancs, laissent deviner des caleçons ou des shorts plus mats. Aux pieds, des mi-mocassins indiens, mi-sandales.

Beaucoup de légèreté chez Armani

Même attention portée à la légèreté chez Emporio Armani, dont la collection est encore une fois classique, bien taillée, élégante et résolument moderne à la fois.
Béret enfoncé sur la tête ou porté à la main, les mannequins semblent glisser tant leurs costumes de soie semblent taillés pour l'envol.

Couleurs "fusion" – beaucoup de gris là aussi, mais aussi du bleu marine et du vert d'eau – et peu d'imprimés, et encore ces pantalons à pinces aux cuisses larges mais resserrés au dessus des chevilles, voire à mi-mollet.
Au diable donc les slims ! "J'ai décidé de réagir au pantalon cigarette, souligne Giorgio Armani. Peut-être que cette nouvelle forme ne sera pas bien accueillie au départ, mais vous verrez qu'au final, on la comprendra".
Au son d'une chanson italienne sur laquelle il ferait bon danser pieds nus à la plage, s'enchaînent des tenues très urbaines, avec écharpes légères et tennis de ville, mais que de fines bretelles encanaillent un peu.

De la Sicile à la Chine avec Dolce & Gabbana

Le côté canaille était attendu justement chez Dolce&Gabbana. Mais ce sont des "chinoiseries" que l'on a vues.
Quand Sicile, région d'origine des deux stylistes, et Chine, source d'inspiration de la "Palazzina cinese" de Palerme, ancienne demeure royale des Bourbon de Naples, se mêlent, il s'ensuit un mix de couleurs et d'imprimés.

Dragons et paons, citrons et oranges, bambous et cactus, pagodes et oiseaux tropicaux, et des fleurs: la soie, majoritaire, est sublimée et les blouses et chemises, présentées par une centaine de mannequins dont beaucoup d'origine asiatiques, sont d'une grâce aérienne tout comme les pantalons, là encore larges.

Mais aussi des shorts, des bermudas, des pyjamas, et aux pieds des espadrilles de toutes sortes, des vestes à col évidemment Mao et quelques Vierges à l'enfant – on est Sicilien ou on ne l'est pas – en médaillon, qui ornent des jeans troués.

Très peu de doré, rien de bling bling, du raffiné et des couleurs tout à fait estivales : gris clair, beige, blanc cassé, crème et sable. 

L'aventure spirituelle de Bottega Veneta

On a vu des hommes virils, sportifs et classe à la fois chez Bottega Veneta, où le directeur artistique Thomas Maier avait choisi de s'inspirer "de la fascination d'un voyage du type +retour à la nature+, à la recherche d'une quête spirituelle".
Les mannequins portent des chaussures de trekking aux pieds, avec de grosses chaussettes remontant jusqu'à mi-mollet et recouvrant des pantalons en molleton, type fuseau de montagne.

Des hauts plateaux d'Afghanistan, les modèles ont ramené des calottes qui rappellent les couvre-chefs des Pachtounes, tandis que maille et velours apportent une touche de confort à cette collection sportswear chic, où le gris chiné du granit et le kaki des arbres prédominent, avec des touches de bleu, de vert et de rouge.

Slips en soie et tatouages chez Vivienne Westwood

Virilité toujours chez Vivienne Westwood, qui sait sublimer les hommes et leur plastique, en leur faisant porter des slips en soie, ou des tuniques déchirées ou à trous, laissant entrevoir des tatouages.
Les pantalons sont taille basse, larges, laissant nonchalamment entrevoir les caleçons à rayures, très British, un côté dandy tout comme les costumes, très réussis.  Parfois lacés à la taille, rayés, à mi-mollet, ces sortes de pantacourts chics ne détonneraient ni à la City ni sur un yacht.

Mais ces hommes sont également sensibles, capables de s'enflammer pour le dernier combat de la Lady anglaise, à savoir les hommes politiques, qu'elles qualifient de "criminels", car ils "jouent ensemble à de gigantesques parties de Monopoly avec les banques centrales".

Selon elle, "l'austérité (que certains hommes politiques prônent, ndlr) n'est qu'une façon de transférer la richesse des pauvres vers les riches".  

Voyage, voyage chez Salvatore Ferragamo

Enfin, voyage encore chez Salvatore Ferragamo, dont l'homme, urbain s'il en est, très business – le défilé se tient toujours au sein de la Bourse de Milan et ici, on porte des cravates fines, ce qu'on ne voit pas ailleurs –, s'est rendu chez les Mauritaniens, dont les tapis faits main ornent le podium.

Dessinée par Massimiliano Giornetti, qui la qualifie "d'élégante et de nonchalante", la collection se démarque par un choix pointu de ses couleurs – moutarde, chocolat, vert émeraude, crème, camel, rouge brique –, de ses coupes, droites et sans fioritures, et pour ses chaussures, très couture.

Les pantalons, sombres aux fines rayures, sont cigarette, avec leur revers au dessus des chevilles, et à la ceinture, est accrochée une petite pochette en cuir qui tombe sur les fesses. Sur la tête ? Une casquette !

Pour Dsquared, il n'y a pas un homme, mais des hommes

Chez Dsquared, l'homme est multiple, à la fois un surfeur-skateur au corps entièrement tatoué et ce promeneur nonchalant et élégant en terrasse à Capri.

Pour les jumeaux canadiens Dean et Dan Caten, dont le défilé est à chaque fois un moment fort de la fashion week milanaise tellement ils ont à coeur de surprendre leurs clients, la mode est à chercher du côté des surfeurs, des alpinistes, bref des sportifs de l'extrême, toujours en quête de "la" vague ou du spot à escalader.
D'où des mannequins vêtus de combinaisons en stretch intégralement couvertes de tatouages, qui portent par dessus des débardeurs en coton blanc et des bermudas en cuir extra-larges.

Sur la tête, de drôles de couvre-chefs, moitié hauts de forme, moitié bonnets des Péruviens des hauts plateaux, dont les ponchos habillent quelques uns des modèles, à la peau ultra bronzée.
Le jean est baggy, et aux pieds, de grosses chaussures de trekking, dont les lacets fluo sont des cordes d'escalades, que l'on retrouve aussi accrochées à de gros sacs à dos d'alpinistes.

La combinaison de surf en néoprène est déstructurée et au cou, plusieurs colliers ethniques ajoutent à ce côté cool chic, idéal pour la clientèle jeune et sportive de la marque : une réussite !

Fleurs, oiseaux et papillons chez Gucci

Gucci a ouvert la voie avec une collection fluide faite de chemisiers à col noué, de shorts en crochet et de manches à froufrous. Alessandro Michele accumule les ravissants motifs en forme de papillons et d’oiseaux, les jacquards fleuris et les chemises en dentelle ornées de détails et de lanières empruntés au vestiaire féminin. Côté accessoires : des lunettes teintées, des ballerines lacées et une jolie panoplie de bagues scintillantes.

Couleurs "girly" pour Etro et pierres précieuses pour Canali

La maison italienne Etro a choisi le paisley et les motifs floraux comme fil conducteur. La marque a pris le parti d'habiller ses mannequins de couleurs "girly" comme le rose poudré ou le lilas. Les matières douces contrastent fortement avec les coupes, éminemment masculines.

Chez Canali, les coloris rappelant les pierres précieuses sont à la fête. Lilas gracieux, violets poudrés, oranges teintés de carmin et bleu canard ont envahi le podium. Là aussi, le total look était de mise pour accentuer le contraste avec des silhouettes qui demeurent des plus viriles.

Défilé Jil Sander printemps-été 2016

1. La veste est incontournable

Si l’on en croit les défilés masculins milanais, la saison printemps-été 2016 sera celle de la veste. Élégante et chic, rebelle ou fonctionnelle, elle sera l’élément-clé de la tenue.

Pratique n'est pas synonyme d'ennuyeux, comme le démontre Jil Sander en multipliant les pièces d'extérieur puristes et subversives au style industriel. Les textiles foncés comme le nylon et la toile enduite introduisent une esthétique sombre, insurrectionnelle tandis que les coupes élégantes affichent des silhouettes minimalistes. Les détails zippés, les poches et les sangles ajustables représentent brillamment le "fonctionnalisme urbain" et "l'extrême précision" de la collection.

Philipp Plein, au contraire, a livré une collection au style exagérément éblouissant comportant des blazers noirs et crème associés à du sportswear stylisé. La veste bomber matelassée en soie couleur cerise et ornées de la manche au coude en est un emblème. Le cuir est roi. Le noir, le crème et le rouge, au fondement de la palette de couleur. En clou du spectacle, le public a découvert une étincelante création dorée.

Défilé Philipp Plein 2016

2. Les chaussettes, c'est chouette

Partout, des chaussettes, épaisses de préférence et portées dans des sandales en cuir. Ainsi, chez Bottega Veneta, où, comme l'écrit Guy Trebay dans le respecté et pointu International New York Times, "si Thomas Maier (le directeur artistique allemand de la marque italienne) n'avait rien fait d'autre dans sa vie, il pourrait prétendre à avoir à lui tout seul légitimé le look du touriste allemand".

Chez Moncler, le directeur de la création Thom Browne, inspiré cette saison par le monde du canotage et de l'aviron, a lui aussi choisi le sacrilège ultime : faire porter à ses mannequins des chaussettes de sport, remontées jusqu'aux mollets, à l'intérieur de chaussures bateau, qui comme chacun sait depuis John F. Kennedy, se portent pieds nus. Miuccia Prada a elle aussi opté pour la chaussette bien visible. Mais en les superposant, avec deux modèles fins et de couleurs différentes du type de ceux que portent les hommes d'affaires avec leurs costumes sauf qu'ici ils "habillent" des shorts courts.

3. Le monde du travail, c'est classe

Les jeunes hommes de la marque N.21, dessinée par Alessandro dell'Acqua, sont vêtus de salopettes et combinaisons de travail, extra-larges, sur lesquelles tombent parfois des tuniques qui font effet de jupes. "Je voulais m'amuser un peu et jouer avec les superpositions", explique M. dell'Acqua, qui a fait chausser ses mannequins de grosses chaussures de chantier noires, aux lacets épais mais qui révèlent un bout de talon.

Chez Salvatore Ferragamo, c'est la cravate fine et unie de l'employé branché qui fait son retour. Tandis que pour Antonio Marras, ce sont les uniformes des pêcheurs et des marins dont il s'est inspiré et qu'il a revisités, le tout dans une ambiance très "Love Boat", comme il le dit lui-même.

4. La transparence, c'est tendance

C'est Stefano Pilati qui a affirmé le premier que la transparence traduisait son "approche tailleur de la mode". Il a donc dessiné des pantalons en voile de coton, resserrés aux chevilles, dont certains, blancs, laissent deviner des caleçons ou des shorts plus mats.

Chez Gucci, ce sont les chemises-chemisiers qui sont en voile fine, en dentelle, jouant sur les transparences grâce à des couleurs pastel très féminines.

Défilé Gucci printemps-été 2016

5. Le jeu des imprimés et des tissus

Chez Prada, le tee-shirt n'est pas en coton mais en python coloré et il se porte avec des costumes classiques. Ce tissu de luxe, "c'est la nouvelle popeline", confie Miuccia Prada, au risque de choquer.
Chez Moncler, tradition de la maison oblige, on use de tissus "techniques" : du cordura léger, du nylon ripstop notamment. Pour la marque Les Hommes, dont la collection s'est inspirée cette année du monde du surf, les stylistes belges Tom Notte et Bart Vandebosch citant précisément le film culte "Point Break" (sorti en 1991 avec Keanu Reeves et Patrick Swayze et dont un remake est sur le point de sortir aux Etats-Unis), la combinaison de plongée est la norme. Les sweats et les bombers sont en néoprène et certains détails sont issus de la technologie 3D.

6. Homme/femme, les différences s'estompent

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Le styliste de chez Gucci, Alessandro Michele, en a fait le thème central de son défilé, baptisé "détournement", à la présence féminine très forte, non seulement physique puisque des jeunes femmes défilaient aussi, mais également par l'emprunt aux codes vestimentaires féminins. Avec force lavallières et fleurs ornant le cou des hommes, du pastel, des imprimés fleuris, des broderies et des pantalons skinny au possible.