Depuis sa sortie sur Netflix le 12 mars dernier, la série britannique The One, sorte de thriller-drame sur fond de SF, a réussi à s’imposer dans le top de la plateforme en France, aux USA et dans 71 pays. Un « succès » à la Netflix un peu volé tant le postulat SF est trompeur et le scénario tentaculaire.
The One est l’histoire en huit épisodes de Rebecca Webb, la PDG impitoyable d’une agence de rencontre 2.0 type GAFA qui a révolutionné l’amour. Soumettez un échantillon d’ADN, payez les frais et trouvez votre correspondance génétique parfaite.
C’est à n’en pas douter un pitch de science-fiction prometteur, mais dans lequel la série puise finalement assez peu de matière. Les débats épineux autour du déterminisme génétique sont ignorés au profit d’une affaire policière façon jeu du chat et de la souris mettant en vedette une directrice d’entreprise amorale et l’agent de police qui tente de la piéger. Lorsqu’un corps est découvert dans la Tamise, le soupçon tombe sur Rebecca, jouée par Hannah Ware (Shame, L’ange du Mossad) – pas assez charismatique. Quels secrets cache-t-elle à propos de son entreprise, son co-fondateur et les événements d’une nuit fatidique un an plus tôt ?
The One, écrit par Howard Overman (Misfits, Atlantis) d’après un roman de John Marrs (Âmes soeurs, 2017), essaie d’être beaucoup de choses à la fois. C’est un point de vue sur l’amour et les relations, un traité sur la façon dont l’appariement via l’ADN est effrayant et étrange et probablement immoral, et une histoire de meurtre mystérieux par là-dessus. Ces intrigues tentaculaires sont enlisées par un premier épisode qui rebondit autour de sa chronologie et ne prend pas le temps de situer vraiment son sujet : pourquoi Rebecca passe si vite du statut de chercheuse discrète à Elon Musk ?
La transformation de Rebecca en si peu de temps est remarquable. Dans les nombreux flashbacks qui nous renvoient 2 ans plus tôt, Rebecca est une jeune femme souriante et décontractée, mais en tant que visage de The One, elle porte des costumes stricts et des tonnes de maquillage avec les cheveux tirés en chignon serré et parle lentement de révolution, vantant son système de « match ».
Cette insistance à rebondir, ne donnant au spectateur que des bribes d’informations, crée un effet exaspérant au lieu de faire entrer le spectateur dans l’histoire. Pourquoi ? Parce que nous voulons en savoir plus sur la Rebecca de 2019 et essayer de la comprendre, dans sa relation avec Ben notamment. Mais nous n’en avons jamais l’occasion parce que la Rebecca de 2021 est sur-représentée et semble être tellement malfaisante. Que s’est-il passé au cours de ces deux années ? La mort de Ben a-t-elle fait quelque chose pour la transformer ? Nous craignons de n’obtenir aucune de ces informations avant d’avoir parcouru toute la saison, et il ne semble pas y avoir suffisamment d’arguments pour nous inciter à le faire.
Les deux autres intrigues parallèles, Hannah / Mark et Kate / Sophia, ressemblent à une tentative de montrer à quel point The One peut être dangereux, mais rien de plus. Pourquoi Hannah se languit-elle d’une correspondance ADN alors qu’il semble qu’elle et Mark sont amoureux comme jamais ? Et nous savons que l’accident de Sophia à Londres n’était probablement pas un accident.
Mais on a l’impression que ces histoires ne jouent pas le rôle espéré et détournent simplement l’attention de l’intrigue principale : qu’est-il arrivé à Ben et pourquoi ? Oh, et il y a aussi la petite question du manque d’éthique de Rebecca : il semble que son principal financier, Damien Brown (Stephen Campbell Moore), ait des antécédents louches, et craigne également un retour de flamme si l’utilisation de l’ADN par la société est jugée contraire à l’éthique. Nous avons donc un autre scénario à suivre. Combien de direction cette série peut-elle continuer à suivre avant d’en perdre une ou deux en route ?
Bref, vous l’aurez compris, The One se prend les pieds dans son scénario dès le début en nous vendant une série de science fiction sur le matching amoureux via l’ADN et en nous servant en réalité une intrigue policière basique sur fond de pseudo-science. Tout cela passé par la case cahier des charges Netflix (LGBT, multi-culturel) et empêtré dans un fatras d’intrigues secondaires qui laisse le spectateur un peu perdu.
En tant que créateur, Overman a été impliqué dans un certain nombre de séries de genre vraiment amusantes, notamment sur le voyage dans le temps avec Future Man ou sur des super-héros décalés dans Misfits. The One n’est pas sa plus grande réussite (ne serait-ce que parce que sérieusement, Misfits est incontournable, du moins pour ses deux premières saisons). Mais c’est suffisamment solide pour vous encourager à poursuivre le visionnage et si vous tenez jusqu’à la fin, le final de la saison rempli de questionnements (là encore) et de fils d’intrigue irrésolus vous donnera probablement envie d’une deuxième saison.
Notre note : ⭐ ⭐ ★ ★ ★
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